Mon photographe préféré
La ligne de l’horizon dans les images se trouve au beau milieu, séparant le ciel de l’océan. Il n’y a pas de nuages, ni oiseaux, ni navires, ni l’île. Les manuels de photographie qui préconisent une composition en trois parties et un sujet proéminent sont complètement ignorés. Voici la célèbre série "Seascape" du photographe japonais Hiroshi Sugimoto.
Sugimoto était allé photographier au monde entier pour cette série depuis les années 1980. Et cela avait duré 23 ans. Même si tous les titres des images ont indiqué l’endroit et l’année d’où elles sont faites, il n’y a pas de trace des géographies et l’époque. On ne voit que les lumières, l’air, de l’eau et l’atmosphère. D’après lui, c’était une série qui pouvait être partagée avec les anciens.
Depuis longtemps, je croyais que c’était l’éternité que je constatais dans ces images jusqu’à l’été de 2012, lorsque j'ai vu son œuvre originale dans une galerie à Pékin. L’espace de cette galerie était tellement grande qu’on pouvait y voir ses plusieurs séries très connues.
Et la série “Seascapes” se trouvait dans l’espace le plus intérieur. Les invincibles paysages marins sont vus alignés, tous environ 1.2m par 1.5m. En regardant les changes subtils du ciel et de l’eau, j’ai subitement découvert que, d’après l’ordre des images, l’horizon qui semblait figé était en fait en perpétuelle évolution. D'un début joyeux et vivant à une séparation nette, elle s'estompe et s'efface jusqu'à la dernière, un état d'encre intense, pour finalement se dissoudre dans le chaos, qui semblait l'origine de la vie.
Cela me rappelait un poème très connu en Chine:
Qui près du fleuve a vu la lune pour la première fois ?
Et en quelle année la lune sur le fleuve a-t-elle brillé pour la première fois sur l'être humain ?
Il s'avère qu'une poésie aussi majestueuse peut être présentée en images.
Grâce à cette série, Hiroshi Sugimoto figure toujours en tête de la liste de mes photographes préférés.